Dans le cadre de cette deuxième année, nous poursuivons nos travaux de recherche et de réflexion autour d’activités favorisant le développement de l’esprit critique chez les élèves. Afin de soutenir au mieux les enseignants de mathématiques dans la mise en œuvre de séances pédagogiques sur ce thème, nous avons également choisi de créer un espace Magistère intitulé : « Esprit critique dans les pratiques mathématiques des élèves ». Cet espace pourra éventuellement servir de support à une formation proposée dans le cadre du plan de formation académique. Notre problématique et les 5 grands domaines retenus restent inchangés par rapport à l’année 2023-2024. | ![]() |
Notre problématique
En quoi certaines activités mathématiques du collège et du lycée peuvent-elles développer l’esprit critique des élèves, cette pensée qui permet d’être indépendant dans ses choix, dans un monde où il nous faut distinguer ce qui est certain, ce qui est important et ce qui est éthique, et dans lequel nous sommes submergés d’informations ? Tout ce que nous entendons, lisons, est-il digne de confiance ? Pourquoi la vérité est-elle importante et où la trouver ? N’y a-t-il toujours qu’une seule vérité, un seul choix possible ?
Et en particulier, peut-on croire les intelligences artificielles ? Un argument mathématique est-il toujours fiable ?
Rappel des 5 grands domaines retenus
Les activités que l’on peut rencontrer dans ces domaines, essentiellement mathématiques, nécessitent particulièrement une capacité à exercer son esprit critique.
Expérimentations pédagogiques de l’année :
- Exercer son esprit critique avec des questions-flash : automatismes dans la vie courante (en construction)
En 2023-2024, des exercices de type questions-flash ont été expérimentés pour entraîner les élèves à repérer rapidement des éléments mathématiques potentiellement problématiques pour le lecteur dans des situations de la vie courante. Cette pratique a été approfondie pour mieux en mesurer les effets. L’objectif est de développer l’esprit critique et des automatismes face aux informations de nature mathématique présentes dans notre quotidien (prix, graphiques, pourcentages, etc.). Les exercices sont présentés sous forme de diaporamas toutes les trois semaines environ. Chaque situation est étudiée en deux temps : d’abord une réaction rapide (“ce que l’on voit”), puis une analyse plus approfondie (“ce que l’on devrait corriger”). Les élèves sont ensuite invités à tirer des leçons générales sur les erreurs observées et les réflexes à adopter. Les séances ont évolué en six séries thématiques, allant des réductions de prix à la géométrie. Les élèves ont d’abord rencontré des difficultés, notamment en lecture graphique et en expression écrite, mais leurs réponses ont progressivement gagné en clarté, pertinence et surtout en esprit critique. Les élèves ont appris à vérifier les informations à comprendre que les erreurs ne sont pas toujours intentionnelles, ils ont aussi découvert ce que peuvent être quelques biais cognitifs. L’exercice les pousse à ralentir leur raisonnement automatique pour analyser avec plus de rigueur les informations mathématiques qui les entourent.
- Exercer son esprit critique en mathématiques : tâche intermédiaire(en construction)
Cette séquence pédagogique s’inscrit dans la continuité des questions-flash et propose deux activités centrées sur la lecture critique de graphiques dans la vie courante. L’objectif est de développer l’esprit critique des élèves en les amenant à réfléchir sur les effets des choix de représentation graphique (comme l’échelle des axes) et à distinguer corrélation et causalité. L’ activité 1 propose l’analyse comparative de diagrammes présentant les mêmes données sous des formes différentes. Les élèves, en binômes, choisissent un titre et justifient leur choix, avant de confronter leur interprétation avec celle d’un autre groupe. Cela met en lumière les effets de présentation graphique sur la perception des données. L’activité 2 aborde le piège de la corrélation. Des graphiques volontairement absurdes (comme la corrélation entre consommation de margarine et taux de divorce) sont utilisés pour amener les élèves à douter des liens apparents entre grandeurs. Les séances ont montré que si les élèves progressent à l’oral, ils rencontrent encore des difficultés à exprimer leurs analyses par écrit, souvent à cause d’un manque de vocabulaire ou d’une tendance à vouloir “répondre comme l’attend le professeur d’habitude”. L’humour involontaire de certaines conclusions absurdes a permis de désamorcer certaines erreurs et d’ouvrir la discussion sur les limites de l’interprétation graphique. Au fil des échanges, les élèves apprennent à ralentir leur raisonnement, à remettre en question ce qu’ils voient et à justifier leurs interprétations. Ils prennent conscience que des graphiques peuvent être trompeurs et qu’il est essentiel de confronter ces représentations à leur plausibilité et aux connaissances de fond.
- IA et esprit critique (en construction)
Dans le cadre de plusieurs niveaux scolaires (3ᵉ, 2nde, Terminale), des enseignants ont intégré l’intelligence artificielle, notamment ChatGPT, comme outil pédagogique afin de développer l’esprit critique des élèves. Bien que certains aient utilisé l’IA pour faire leurs devoirs, l’objectif principal était d’apprendre aux élèves à ne pas prendre ses réponses pour argent comptant.
Méthodologie :
Les élèves comparent des productions d’IA à celles de camarades, analysent les erreurs, débattent, votent sur les bonnes solutions, et parfois testent eux-mêmes des prompts pour pousser l’IA à corriger ses erreurs. L’activité repose sur des exercices variés (géométrie, algèbre, problèmes ouverts) et alterne entre travaux individuels, en groupes, devoirs maison, et débats collectifs.
Résultats observés :
- Les élèves sont d’abord impressionnés par la rapidité et la précision de l’IA, mais finissent par détecter ses limites.
- Ils apprennent à questionner ses réponses, à améliorer les consignes données, et à formuler eux-mêmes des jugements.
- Des progrès dans l’analyse des raisonnements, la rigueur mathématique, et la vérification des sources sont notés.
- Les échanges en classe permettent aux élèves, même discrets, de s’impliquer davantage.
Limites :
- Certains débats ont été biaisés par l’effet de groupe ou par la difficulté des exercices.
- L’analyse est plus difficile pour des élèves peu habitués à des formats complexes ou non repérés.
- Le manque de temps a parfois empêché de prolonger ou rejouer certaines expériences pour renforcer les acquis.
Conclusion :
L’usage de l’IA en classe, quand il est guidé par l’enseignant, constitue un levier puissant pour encourager la réflexion, la remise en question des automatismes, et la construction d’un véritable esprit critique.
A retrouver également :