Dénouement du procès pénal
Des faits apparemment répréhensibles sont commis. Avant d’envisager la condamnation pénale de leur auteur, encore faut-il que des poursuites soient engagées contre ce dernier. Cette charge est confiée au ministère public – le parquet – qui représente les intérêts de la société et en défend les valeurs en faisant juger les délinquants par une juridiction répressive.
Le ministère public, et à sa tête le Procureur de la République, est informé de la commission d’une infraction par plusieurs sources. D’une part, il reçoit les dénonciations des simples particuliers dont les plaintes, émanant de la victime de l’infraction, ne sont qu’une variété. D’autre part, il est destinataire des procès-verbaux et rapports dressés notamment par les membres de la police judiciaire, appartenant principalement aux corps de la police nationale et de la gendarmerie nationale.
L’enquête judiciaire est mise en œuvre par les officiers de police judiciaire qui, après avoir informé le Procureur de la République des indices existants, agissent sous la direction de ce magistrat. L’enquête judiciaire recouvre l’ensemble des investigations réalisées afin de rassembler les preuves d’une infraction, avant le déclenchement des poursuites : elle peut être de deux types.
L’enquête préliminaire est ouverte dès lors qu’on soupçonne la commission d’une infraction. Dans ce cadre, peuvent être réalisés des contrôles et vérifications d’identité, des perquisitions, des saisies, des auditions… Ces dernières peuvent être menées au besoin dans le cadre d’une garde à vue lorsque existent à l’encontre d’une personne des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. La personne gardée à vue bénéficie alors de garanties dont on lui donne immédiatement connaissance dans une langue qu’elle comprend : information sur la durée de la garde à vue, à savoir en principe vingt quatre heures renouvelables une fois, possibilité de faire prévenir un proche par téléphone, possibilité de demander un examen médical, possibilité de s’entretenir avec un avocat en principe dès la première heure. D’autres investigations sont également possibles, sous condition d’avoir été autorisées préalablement par un juge des libertés et de la détention compte tenu de leur caractère particulièrement attentatoire aux libertés : interception des télécommunications…
L’enquête de flagrance peut être mise en œuvre pour les infractions en cours ou venant de se produire : elle confère des pouvoirs plus importants et permet une réaction pénale rapide pour mettre fin au trouble et conserver au mieux les preuves de l’infraction. Elle donne notamment la possibilité d’agir sans le consentement de la personne impliquée, par exemple pour réaliser une perquisition domiciliaire.
Au vu des informations collectées lors de l’enquête judiciaire, le ministère public vérifie si les faits dont il a connaissance sont bien vraisemblablement constitutifs d’une infraction, au regard de la loi. En cas de conclusion positive, il se prononce sur la mise en mouvement des poursuites, c’est-à-dire l’exercice de l’action publique, celle engagée au nom de la société contre le délinquant en vue de l’application d’une peine. Le principe de l’opportunité des poursuites met en effet le ministère public en mesure de ne pas déclencher le procès pénal et de laisser les faits sans réponse pénale si tel lui paraît le réclamer l’intérêt général. Afin de remédier aux dangers nés d’un tel pouvoir d’appréciation et du principe de subordination hiérarchique (le ministère public est en effet soumis à l’autorité du Garde des Sceaux, ministre de la Justice), un pouvoir concurrent de déclenchement des poursuites est reconnu aux victimes de l’infraction. Ainsi, face à l’inertie du ministère public, la victime conserve toujours la possibilité d’exercer son action devant les juridictions répressives avec pour effet de déclencher le procès pénal.
Le ministère public peut d’abord décider de ne pas poursuivre, soit parce qu’il estime qu’aucune infraction n’a été commise, soit parce qu’en application du principe de l’opportunité des poursuites, il n’estime pas utile de la poursuivre : il s’agit alors d’un classement sans suite, décision sur laquelle le Procureur de la République peut toujours revenir au vu d’éléments nouveaux ou en vertu d’une nouvelle appréciation de l’opportunité de poursuivre, dans la seule limite de la prescription de l’action publique. Cette décision de classement sans suite peut être assortie de mesures alternatives aux poursuites, auxquelles le Procureur de la République subordonne sa décision de classer l’affaire lorsque qu’elle lui apparaît de nature à assurer la réparation du dommage subi par la victime, mettre fin au trouble résultant de l’infraction ou contribuer au reclassement de l’auteur des faits, grâce à l’une des mesures prévues : 1) rappel à l’auteur des faits des obligations qu’il a méconnues ; 2) orientation de celui-ci vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle ; 3) demande de régularisation de sa situation ; 4) si toutes les parties en sont d’accord, recours à une médiation pénale.
Le ministère public peut ensuite proposer à l’auteur des faits une composition pénale. Ce procédé, comparable à une transaction sur l’action publique, vise à faire exécuter à l’auteur de faits constitutifs de certains délits ou contraventions une ou plusieurs mesures dans un certain délai comme le paiement d’une amende de composition, la remise d’un permis, l’accomplissement d’un travail d’intérêt général, la réparation du dommage subi par la victime. Si la proposition est acceptée par l’auteur des faits et que la mesure est correctement exécutée dans le délai imparti, l’action publique est éteinte ; dans le cas contraire, le ministère public retrouve toute latitude pour poursuivre le délinquant.
Le ministère public peut enfin décider de la mise en mouvement des poursuites. S’il estime que des investigations complémentaires sont nécessaires pour que le dossier soit en état d’être jugé – et obligatoirement en matière de crimes -, le Procureur de la République décide l’ ouverture d’une information judiciaire en saisissant le juge d’instruction par un réquisitoire introductif délivré tantôt contre toute personne que l’instruction fera connaître (réquisitoire « contre X ») tantôt contre une ou plusieurs personnes dénommées, comme auteurs, coauteurs ou complices pour les faits visés et résultant des pièces jointes. Si au contraire une information judiciaire n’est pas obligatoire, le Procureur de la République peut décider de la comparution de la personne soupçonnée devant la juridiction de jugement compétente. Dans ces deux cas, le procès pénal peut se dérouler.