ÉVALUATION SIXIÈME 2005 – FRANÇAIS
La lecture documentaire aux évaluations nationales de sixième |
Mathilde Mathisse, Professeur de Lettres Modernes |
|
Les résultats globaux à l’évaluation 2005 de français |
|
Les évaluations de français à l ‘entrée en 6ème ont vu, en septembre 2005, la mise en place de nouveaux protocoles. Le nombre d’items (57 contre 83 en 2004), les compétences évaluées, les consignes de passation et de codage, tout cela diffère des années précédentes et peut relativiser le score moyen des résultats de cette année.
Le tableau ci-après présente les résultats par champs et par capacités obtenus par les 75 élèves de sixième du collège Jean Rostand de Casteljaloux (47) à l’évaluation de français. En regard sont donnés les scores de réussite à l’échelle départementale et à l’échelle académique.
[Cliquez pour afficher l’image en grand]
|
Dans le cadre d’un atelier lecture, qui tente de venir en aide aux élèves en grande difficulté, l’attention s’est portée sur la lecture documentaire qui, bien qu’elle soit difficile, prime chez ces élèves car elle donne du sens et de l ‘intérêt à l ‘acte de lire. Le logiciel Jade a permis d’affiner l’analyse des compétences évaluées et des résultats obtenus en lecture documentaire, ainsi que d’établir une comparaison avec les scores des autres élèves de 6ème du collège. |
|
Le texte documentaire comme support à l’évaluation de français |
|
Chaque année, lors de l’évaluation nationale de français à l’entrée en sixième, le texte documentaire sert de support à une partie des exercices, qu’il se présente sous forme de tableau, d’article de dictionnaire ou d’extrait d’œuvre documentaire accompagné ou non d’une illustration. Il fait partie aussi des genres que l’on demande à l’entrant en 6ème de reconnaître et d’identifier.
Aux évaluations 2005, les exercices de la séquence n°1 (exercices 1 à 11), avaient pour support un texte documentaire composé :
– d’un texte introducteur: Le cycle de l’eau (items 1 à 9)
– d’un support documentaire avec illustration : Que deviennent les eaux usées ? (items 10 à 16) |
|
Les compétences évaluées dans la séquence n°1 : |
|
Le lexique
Comprendre la formation des mots (préfixation, suffixation) : items 1, 3,4 et 14
Comprendre un mot rare en s’aidant de la formation du mot : item 2
Comprendre le sens d’un mot par son contexte : item 10
L’orthographe
Connaître les terminaisons verbales des temps simples, ici le présent : items 5 à 7
Identifier les référents des substituts lexicaux et pronominaux
Identifier le référent d’une reprise lexicale par son déterminant possessif : item 8
Identifier le référent d’une reprise pronominale : item 9
Exploiter les indications logiques et spatio-temporelles
Situer une étape avant ou après une autre : items 12 et 13
Prélever des informations ponctuelles et explicites
Relever trois éléments de réponse : item 16
Classer et relier des informations
Retrouver l’ordre de quatre actions : item 11
Construire une nouvelle information à partir d’une prise d’indices multiples
Bâtir une information nécessaire à la compréhension : item 15 |
|
Tableau des résultats par items (n°1 à 6) |
|
[Cliquez pour afficher l’image en grand]
|
|
Tableau des résultats par compétences |
|
[Cliquez pour afficher l’image en grand]
|
|
Les compétences les plus échouées (score inférieur ou égal à 50%) par l’ensemble des 6e :
– Comprendre un mot rare en s ‘aidant de la formation du mot (37.3%) ;
– Connaître les terminaisons verbales des temps simples (44.4%) ;
– Identifier le référent d ‘une reprise lexicale (24.0%) ;
– Identifier le référent d ‘une reprise pronominale (44.0%) ;
– Prélever des informations ponctuelles et explicites (14.7%) ;
Les compétences les plus échouées par les élèves de l’atelier :
– Prélever des informations ponctuelles et explicites : 00.0%
– Identifier le référent d ‘une reprise lexicale : 00.0%
– Identifier le référent d ‘une reprise pronominale : 12.5%
– Comprendre un mot rare en s ‘aidant de la formation du mot: 12.5%
– Comprendre la formation des mots : 15.6%
– Classer et relier des informations : 25.0%
– Construire une nouvelle information : 37.5%
Il est bon de rappeler que les résultats aux évaluations doivent être analysés de manière approfondie et qu’il est intéressant de s’interroger sur l’origine des difficultés rencontrées : tel exercice est-il échoué à cause de la formulation de la consigne, du vocabulaire métalinguistique utilisé, de la méconnaissance de telle notion par les élèves, d’un manque de temps ou d’une peur de l’erreur ? |
|
Lecture critique du nouveau protocole et des résultats |
|
La lecture des exercices 1 à 11 appelle quelques commentaires. La difficulté parfois des tâches, la formulation des consignes et la mise en page du support documentaire expliquent en partie le faible taux de réussite dans certains exercices de cette première séquence. À titre d’exemples :
1. L’exercice 1 qui ouvre les évaluations a de quoi décourager dès le début certains élèves par sa difficulté. Il présuppose que l’élève maîtrise la notion d’adjectif et la formation des mots.
De plus, la démarche logique devant un mot rare est d’abord d ‘essayer de le comprendre, puis de s’aider de sa formation pour expliciter son sens, et non l’inverse.
(Résultats items 1 et 2 : atelier 00.0% et 12.5% /hors atelier 31.3% et 40.3%)
2. L’exercice 4 qui évalue la compétence « identifier le référent d’un substitut lexical » porte en fait sur le référent d’un déterminant possessif : « sa route & », ce qui rend la tâche plus difficile.
(Résultats item 8 : atelier 00.0% / hors atelier 26.9%)
3. Dans l’exercice 5, on demande à l’élève de trouver le référent d’un substitut pronominal dans une phrase qui n’est que partiellement citée dans la consigne et dans laquelle n’apparaît pas le référent.
(Résultats item 9 : atelier 12.5% / hors atelier 47.8%)
Il est ici nécessaire et intéressant de croiser les résultats aux items 8 et 9 avec ceux obtenus aux items 17, 18, 40, 41 et 53 sur l’identification et l’usage pertinent des référents des substituts lexicaux et pronominaux pour infirmer ou confirmer les difficultés.
4. La disposition quelque peu maladroite des textes numérotés par rapport aux illustrations (l’étape 3 semble placée avant l’étape 2) rend difficile la lecture du support documentaire et le traitement de l’exercice 8 sur l’exploitation des indications spatio-temporelles.
(Résultats items 12 et 13 : atelier 50.0% / hors atelier 80.6% et 74.0%)
Cependant, si certains exercices ont pu rendre plus difficile le diagnostic, on retrouve toujours le même écart significatif entre les élèves en difficulté et les autres, ainsi que le montre le tableau suivant. |
[Cliquez pour afficher l’image en grand]
|
|
À la lecture de ce tableau, on voit que les scores des élèves de l’atelier sont nettement inférieurs à ceux des autres sixièmes. Même dans le champ « production de textes » échoué par tous, l’écart des résultats est important. Le constat de cet écart se retrouve dans la séquence n°1 qui évalue les compétences en lecture documentaire. Il a paru intéressant de cerner, à l’aide de Jade, une ou deux très grandes difficultés spécifiques aux élèves de l’atelier dans les exercices ayant pour support un texte documentaire. |
|
Exemple de prise en charge d’une difficulté dans le cadre de l’atelier : |
|
Une difficulté rencontrée concerne le champ « connaissance reconnaissance de mots ».
Comprendre la formation d’un mot (item 1), dériver un mot en ajoutant un préfixe (items 3 et 4) ou en ajoutant un préfixe et un suffixe (item 14), expliquer le sens d’un mot rare en s’aidant de la formation du mot (item 2) sont des exercices particulièrement échoués par les élèves de l’atelier. Chez ces élèves de 6ème en grande difficulté, on constate un déficit en vocabulaire. Celui-ci gêne souvent la compréhension d ‘un texte. Ce problème s’accroît lorsqu’il s’agit de comprendre un écrit documentaire qui comporte de nombreux mots nouveaux, et que, bien souvent, le contexte ne permet pas d’expliciter.
En atelier, un travail a été mené sur les différentes méthodes pour comprendre un mot sans le recours au dictionnaire, la lecture de ce dernier étant particulièrement difficile (polysémie des mots, composition de l’article de dictionnaire).
Objectifs :
– Varier les stratégies pour comprendre un mot rare;
– Utiliser les connaissances acquises en vocabulaire pour faire les inférences nécessaires pour comprendre un mot inconnu;
– Utiliser le contexte : chercher des indices avant ou après dans le texte;
– Utiliser la morphologie : étudier la formation du mot rare;
– Mettre en relation le texte et l’image et identifier ces relations;
– Prendre conscience de l ‘organisation spatiale de l ‘écrit ;
Le support :
Le texte documentaire est extrait d’un fichier utilisé par le professeur de S.V.T. et s’intitule « Le peuplement du milieu par la coccinelle ». Il se compose de cinq illustrations alignées verticalement (la coccinelle sous ses différentes formes), une frise chronologique placée aussi verticalement les sépare d’un texte en cinq parties placées en vis-à-vis des dessins.
Démarche :
– Observation initiale du document et de la mise dans l’espace des différents éléments qui le composent (lecture verticale et horizontale).
– Réflexion sur le titre informatif et anticipation sur le sens du texte.
Découverte progressive du texte (une partie après l’autre) :
– Lecture silencieuse.
– De quoi parle ce passage ? Reformulation orale de ce qu’ils ont compris.
– Localisation des erreurs de compréhension dues au lexique.
– Recherche collective du sens des mots ou expressions posant problème.
– Relecture à haute voix du passage par le professeur.
– Quelle information semble importante ici à retenir ?
– Écoute des propositions de chacun.
– Discussion sur le choix et la pertinence des informations retenues.
Observations :
Dans la lecture du titre, le mot « milieu », terme basique, peut poser problème par sa polysémie. Même si cela n’a pas été le cas lors cette séance, il a semblé bon de chercher ensemble les significations variées (travail sur le contexte disciplinaire).
Les erreurs d’interprétation du texte liées au vocabulaire ont fait l’objet d’une réflexion et d’une recherche en commun du sens du mot ou de l’expression par le recours aux différentes stratégies (en relisant le passage, en lisant plus aval, en cherchant des mots de la même famille, en identifiant le radical du mot).
La rencontre avec le mot « larve » (inconnu par tous) a permis une prise de conscience de l’importance des illustrations dans un support documentaire et de l’interaction texte/image. Avant, pour eux, l’image était là « pour faire joli » et ils ne se donnaient pas la peine de lire la légende.
Pour accroître l’intérêt et l’attention portés à la lecture, les élèves sont invités, à chaque étape du texte, à poser de nouvelles questions en rapport avec ce qu’ils viennent d’apprendre. Ainsi, le fait que le texte parle d’une « coccinelle à 7 points » a suscité de nombreuses interrogations sur les types de coccinelles, les nombres de points qui existent. Ils se sont demandé si les informations données ne concernent que la coccinelle à sept points ou bien si elles sont valables pour leurs cousines, si la coccinelle se nourrit exclusivement de pucerons, etc.
Ces questions ont trouvé leurs réponses par l’intermédiaire du professeur de S.V.T. qui leur a fourni une documentation supplémentaire, lue avec beaucoup d’intérêt et d’attention.
Des activités annexes ont été menées en atelier sur le lexique (exercices banque outils + logiciels Lirebel Plus 6ème et Esprit).
– trouver un terme générique à une liste (mot étiquette) ;
– identifier les familles de mots;
– repérer un synonyme dans une liste ;
– retrouver les mots supprimés dans un texte et les réécrire en s’aidant du contexte;
– comprendre le sens d’un mot rare par son contexte;
– identifier les différents sens d’un mot par les contextes donnés. |
|
Conclusion : Lecture documentaire et élèves en difficulté. |
|
Le texte documentaire ne doit pas être considéré comme un sous-genre.
Chez les élèves en grande difficulté, la lecture documentaire qu’ils jugent non scolaire – prédomine, lorsqu ‘elle n ‘est pas l ‘unique lecture pratiquée.
Les élèves ont une grande curiosité du monde qui les entoure et dans lequel ils vivent (les animaux, les records, les voitures, le métier du père, les loisirs…). Le désir de connaissance les pousse à rentrer en contact avec l’écrit à travers les journaux, livres, magazines.
Les réponses qu ‘ils obtiennent parfois à leurs questions, les informations de toute sorte qu ‘ils arrivent à s ‘approprier, même s ‘ils s ‘attardent souvent au sensationnel ou au comique, sont autant de pas dans la (re)prise de confiance en soi. Ce contact avec le concret leur procure un sentiment de sécurité.
Parce qu ‘il possède un caractère propre, parce qu ‘il est pluridisciplinaire, parce qu ‘il consolide les connaissances, parce qu ‘il plaît aux élèves en difficultés et par là -même les motive, parce qu ‘il favorise un contact direct et répété avec le livre, parce que la démarche pour l ‘appréhender diffère de celle suivie devant un texte littéraire, parce qu ‘il permet à l’élève d’acquérir des stratégies de lecture variées, le texte documentaire est riche d ‘enseignements.
Il permet à l ‘élève de :
– se familiariser avec la culture de l ‘écrit ;
– développer des techniques pour devenir un lecteur expert ;
– élaborer des inférences, rechercher des idées principales, résumer et acquérir de nouvelles connaissances ;
– comprendre le monde pour y prendre sa place. |
|